La vie, c’est comme lécher un mur
Je ne me souviens plus comment j’ai
atterri là.
C’était il y a quelques semaines.
C’était il y a quelques mois.
C’était il y a quelques années.
C’est quand tu as dit
J’en ai assez que tu m’emmures
J’avais répondu je t’emmure pas
Tu as répété si tu m’emmures
J’ai dit je comprends pas ce que
tu dis je t’emmure pas du tout
Tu as dit c’est une façon de
parler
Tu m’emmures avec ton silence
Tu m’emmures avec ton goût à rien
Tu m’emmures avec tes problèmes
de relations
Tu m’emmures avec ta musique sans
paroles
Tu m’emmures avec cet air que tu
prends quand les gens parlent
C’est comme si tu avais un
sourire inversé
Quand les gens rient toi tu fais
la gueule
D’ailleurs tu veux jamais les
voir les gens
C’est pour ça que je dis tu
m’emmures
Parce qu’on dirait que pour toi
La vie, c’est comme lécher un mur
Je me souviens vaguement m’être
rassemblé
Avoir je veux dire rassemblé tout
mes forces bien contre ma langue
Et je t’ai dit que oui
Bien-sûr
La vie, c’est comme lécher un mur
Mais qu’avec toi quand je lèche
le mur, il est un peu moins sec
Et alors t’es devenue t’es
devenue d’un blanc que je connais bien
Le blanc d’un mur récemment crépi
Et tu as dit mais je suis pas ton
lubrifiant
Alors depuis ces temps
Je lèche le mur sans lubrifiant
Directement avec la langue
J’ai essayé des lubrifiants de
toutes sortes
J’ai essayé le lubrifiant à base
de drogues
Je voyais toujours pas le bout de
mon mur
J’ai essayé le lubrifiant à base
de médicaments
J'ai essayé le lubrifiant à base d'alcool
J’avançais pas plus du léchage
J’ai essayé le lubrifiant avec
les personnes d’un sexe
J’ai essayé le lubrifiant avec
les personnes de l’autre sexe
Il me semblait que plus je le léchais
plus mon mur il s’allongeait
J’avais la langue en sang
Alors je me suis dit
Tout bêtement
Arrête de lécher pour voir
Du coup, mon mur il a en profité
pour se refaire une santé
Et je me suis trouvé avec le
double à lécher
Le double de mon mur
C'est-à-dire quand je dis le
double
C’est le miroir de mon mur
Un mur de chaque côté
Avec rien que ma langue
Ma seule et unique langue
Pour deux murs qui se font face
Pendant que je lèche j’ai
évidemment les yeux libres
J’ai bien vu qu’ils commençaient
à se rejoindre par les bouts
Mes deux murs
Avec moi et ma langue au milieu
Alors il faut que je lèche plus
vite
Ou alors il faut que je les
abatte ces murs
Mais ma langue n’est pas dure
Elle n’est pas souple et belle
non plus
C’est rien qu’une langue qui
lèche depuis mon origine
A moins que je ne me l’arrache
Et la vie, ce ne sera plus comme lécher un mur
Ce poème est si complètement tragique (et beau).
RépondreSupprimerMerci beaucoup Mafalda
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